Le patrimoine bâti

Depuis l’apparition des premières civilisations, l’Ardenne n’a cessé d’évoluer au fil du temps pour devenir le territoire tel que nous le percevons aujourd’hui.

Voici son histoire…

Village-à-travers-les-âges---Les-Tailles
Ollomont

Les premières civilisations en Ardenne

Les hauts plateaux de l’Ardenne n’ont commencé à être habités que vers 700 avant J.-C. par les Celtes dont l’activité principale consistait en une agriculture d’autosubsistance. Après 30 à 40 ans, les céréales cultivées – principalement le blé et l’avoine – ayant appauvri les sols, les terrains étaient abandonnés et le village se déplaçait plus loin vers des sols plus fertiles.

De cette époque ne subsistent que quelques traces : tombelles, vestiges d’anciens chemins ou de forteresses tel le site du Cheslé.

Durant l’époque gallo-romaine

Pendant plusieurs siècles, l’Ardenne va ensuite subir la domination de l’empire romain. L’Ardenne est alors considérée comme une réserve de bois et de chasse. Une nouvelle voie permet de traverser l’Ardenne en suivant ses crêtes : elle relie Reims à Cologne et modifie le paysage, des fermes imposantes apparaissent et la forêt recule.

De l’an mille jusqu’au milieu du 14ème siècle : fondation des campagnes

Après une occupation mérovingienne, la région va connaître une certaine prospérité et un développement démographique important en raison, entre autres, d’innovations agronomiques. Les villages se “sédentarisent” à proximité des sources, les habitations se regroupent autour de l’église et les champs de cultures sont disposés autour de l’entité villageoise.

Du milieu du 14ème siècle jusqu’à 1700 : le temps des malheurs

A partir du milieu du 14ème siècle, la population va diminuer fortement en raison d’un refroidissement climatique assez conséquent (“petit âge glaciaire”). A la fin de cette période, les habitants les plus fortunés érigent des maisons robustes entièrement en pierre.

De 1700 jusqu’à 1880 :

Cette période plus douce est marquée par l’amélioration générale des transports (main-d’œuvre, denrées et autres marchandises) grâce à l’aménagement de nouvelles voies de circulation. La construction de la chaussée thérésienne, le creusement de canaux de navigation, mais surtout le développement d’un réseau de chemins de fer ouvrent l’économie ardennaise à des régions plus lointaines.

Entre le milieu du 19ème siècle et 1880, la population rurale va doubler. Les villages, très aérés jusqu’alors, vont alors subir une forte densification (introduction de la mitoyenneté). Les nouvelles constructions sont érigées en pierre et non plus à colombages et en torchis, de nouvelles églises, plus grandes, sont érigées.

En 1847, une loi sur la mise en valeur des terres incultes entre en vigueur en Belgique. Elle a pour conséquence, l’intensification de l’agriculture et le reboisement des landes en espèces résineuses donnant à l’Ardenne une “identité” encore présente de nos jours.

De 1880 à 1960 :

En 1880, suite à l’évolution des transports, l’Ardenne est en crise. Attirés par un travail industriel mieux rémunéré, les ouvriers agricoles, privés de revenu, quittent la campagne pour s’installer dans le bassin sidérurgique lorrain ou du sillon Sambre-Meuse.

L’agriculture doit évoluer et s’adapter, l’élevage viandeux et/ou laitier et l’utilisation des barbelés au détriment des haies vives apparaissent. Le paysage connait un nouveau bouleversement.

La Belgique et le Grand-Duché de Luxembourg connaissent à cette époque une évolution différente qui peut encore se lire sur nos paysages actuels. L’Etat luxembourgeois, dans un souci d’équité entre le Sud du pays industrialisé et riche, et le Nord agricole à l’agonie, décide de soutenir directement ou indirectement l’utilisation d’engrais chimiques dans l’agriculture. Ces subventions vont permettre aux agriculteurs de conserver des prix concurrentiels.

A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, des bombardements intensifs en Ardenne vont conduire à la destruction complète des plus gros villages. Au sortir de la guerre, ceux-ci seront reconstruits en quelques années, en suivant les méthodes nouvelles de construction, mais en respectant encore l’implantation du bâti préexistant.

De 1960 à nos jours

Cette période est marquée par l’avènement de l’automobile. Ce moyen de transport se démocratise, modifiant considérablement notre perception de l’espace/temps. Les travailleurs urbains, en quête d’un cadre paysager plus “vert” et d’une certaine tranquillité, viennent s’implanter en dehors des villes. La conséquence est le développement de nouvelles maisons unifamiliales de type “villas quatre façades” le long des routes d’accès au noyau villageois.

Ce phénomène ne va cesser de croître, favorisé par l’industrialisation du secteur de la construction, l’augmentation du pouvoir d’achat d’une frange de la population et l’aménagement de voies de circulation rapides durant les années ’70 et ’80 rapprochant ainsi la campagne des grandes zones urbaines.

Et après

Comme on le constate, le paysage évolue en fonction du mode de vie de ses populations, des nouvelles technologies et de l’histoire. Sa modification n’a jamais été aussi rapide que de nos jours. A nous de prendre du recul et de réfléchir à ce que nous voulons léguer à nos enfants…

Patrimoine bâti – les différentes composantes naturelles.

Le plateau ardennais, s’étendant au-delà de nos frontières tant vers l’Allemagne que vers la France, forme le massif schisto-gréseux. Sur notre territoire, au schiste est associé le grès et bon nombre de nos murs sont ainsi composés de ces deux pierres, formant divers “grès schisteux” en proportions variables.

Le grès, est une pierre dure, qui forme de gros moellons bruts et solides. C’est un agglomérat de grains de sable soudés ensemble par le temps,  les compressions et les températures élevées du ventre de la terre il y a 350 millions d’années. Au toucher, on y devine ces grains de sable intimement soudés, la rendant particulièrement résistante.

Contrairement au grès, le schiste est une pierre fissile. Le mot “schiste” vient du grec “skhizein” signifiant “fendre”. Elle se présente comme une succession de couches fines et juxtaposées, comme de la pâte feuilletée. A son origine, elle est formée d’argile, cette terre modelable que vous connaissez sans doute pour en avoir fait des poteries. Par pressions très intenses des sols et par échauffements puissants lors des plissements géologiques, les argiles se sont solidifiées en couches successives jusqu’à former la pierre de schiste.

Une histoire.

Suivant les carrières jadis très locales qui alimentaient en blocs de pierres les différents villages, les anciennes constructions sont grises ou bleutées (présence davantage de schiste), plus brunes (présence davantage de grès), rousses (présence d’oxyde de fer), rosées ou légèrement verdâtres (présence d’arkose).

Le schiste brut, pour ses qualités esthétiques, est fréquemment mis en évidence dans de multiples éléments architecturaux. Dans certaines régions, il est fondamentalement lié à la vie de l’Ardennais. Il teinte de gris-bleu son paysage, couvre ses toitures de dalles épaisses et protectrices, érige ses murs épais ponctuellement protégés d’un enduit blanc et lumineux. Il parsème les cimetières et les chemins de ses campagnes de lourdes croix chargées de souvenirs…

Cette palette de couleurs locales imprime dans les yeux du promeneur l’identité de notre sol.

Des éléments architecturaux traditionnels.

Les fermes traditionnelles juxtaposent généralement corps de logis et bâtiments agricoles. L’habitation, avec au pignon de nombreuses ouvertures orientées vers le sud était accolée à l’étable côté nord et la proximité des bêtes apportait un peu de chaleur au logement lors des hivers froids. Suivaient la grange, reconnaissable à sa haute et large porte, permettant de rentrer le char à foin et, éventuellement, une étable bergerie à porte très basse où s’abritaient les moutons. Les réserves de fourrages étaient engrangées à l’étage. Ces fermes en pierre étaient fréquemment enduites et blanchies.

L’habitat traditionnel n’est généralement composé que d’un volume très simple et rectangulaire avec un étage inférieur et un ou deux (suivant les moyens financiers) étages supérieurs souvent particulièrement bas. On remarque souvent, adjacent ou séparé, la présence d’un “fournil” où s’effectuait la préparation du pain.

La pente du toit en ardoise est faible, inférieure à 35° et aux extrémités, se remarquent fréquemment les “croupes faîtières”, petits pans de toiture triangulaires au sommet du pignon.

En images :